Depuis 100 ans la famille Aboul Haj joue au mizmar

Nevine Ahmed Vendredi 05 Mars 2021-22:23:08 Chronique et Analyse
Depuis 100 ans la famille Aboul Haj joue au mizmar
Depuis 100 ans la famille Aboul Haj joue au mizmar

Les instruments de musique portent souvent des noms différents, d'après la région, le pays ou les époques. Ils varient alors au niveau du son qu’ils produisent et de la forme et aussi d'après le matériau à partir duquel, ils sont faits. Le « Zurna » turc n'est que le « Hautbois » français et le « Mizmar » égyptien. Une histoire qui remonte à 100 ans dans un des gouvernorats du Delta du Nil.

Les habitants de certains des villages et villes de Kafr Al-Cheikh sont réputés pour être des joueurs de mizmar. Il n'y a pas donc une seule occasion qui passe sans que l’on voit les zammarins (joueurs de mizmar) donner des airs amusants de musique de mizmar. Même les séances coutumières de réconciliation entre familles, elles sont animées par cette musique populaire qui donne une atmosphère haute en couleurs.

La famille Aboul Haj est la plus fameuse à Kafr Al-Cheikh à avoir hérité de cet art. C’est un métier ancestral depuis 1920, comme se vantent les membres de cette famille. Les descendants d'Aboul Haj ont su garder le métier des aïeuls.

Emad Aboul Haj, un des membres de cette famille, raconte alors que lorsqu'il avait 5 ans, il accompagnait son père dans les différentes occasions, pour animer les soirées de noces, les festivités ou d'autres cérémonies. Le mizmar était le maître des instruments. Il se rappelle que lorsqu'il était à l'école, son père refusait qu'il aille avec lui pour animer les soirées, car il tenait à ce qu'il complète ses études. Emad dit qu'il chantait parfois à certaines occasions festives et à l'école, on le choisissait, pour sa belle voix, pour lire le journal du matin ou pour chanter dans les fêtes.

Il y a plusieurs sortes de mizmar, explique Emad Aboul Haj. Ils varient selon le son, le rythme ou parfois encore d'après la façon de fabrication dont est fabriqué le mizmar. Le meilleur, affirme-t-il, est le mizmar en bois. C'est l'authentique, dit Emad.

Le mizmar est donc un instrument à vent et à anche simple ou double. En Egypte, on appelle mizmar, ce qu'on connaît aussi comme étant la « zurna » ou en français, le hautbois. Emad explique que c'est l’un des instruments les plus anciens fabriqués par l'homme à partir de roseaux. Son histoire remonte au 17e siècle et il est connu pour être un instrument de musique populaire. On dit que le mizmar est le père des instruments à vent : la clarinette, le flûte et le hautbois.

Aboul Haj raconte encore que les pharaons sont connus pour leur amour de la musique et notamment le mizmar. Les anciens Egyptiens recouraient à la musique pour éduquer les petits, ainsi que dans les cérémonies, les fêtes et les banquets offerts à certaines occasions, comme celles données dans les temples ou même lors des cérémonies funèbres à l'adieu des morts.

Sur les murs de certains temples, nous pouvons trouver des images de joueurs de musique, qui portent des tambours, alors que d'autres jouent au mizmar.

Emad Aboul Haj souligne qu'il entend certaines personnes jouer au mizmar et ce qui fait la différence entre elles, dit-il, est l'habileté avec laquelle ils jouent et aussi leur connaissance des notes musicales.

Le joueur de mizmar doit connaître la musique en tant que science et pas seulement comme un art. Emad a en fait visité plusieurs pays européens et arabes où il a vu une large affluence de la part des gens pour écouter le mizmar populaire et le mizmar saïdi (de Haute-Egypte).

Aboul Haj, père de Emad souligne avoir hérité de ce métier de son père, et qu'il l'a légué à son fils Emad. Il raconte qu'Emad aime chanter depuis qu'il était enfant et lorsque le père refusait de l'emmener aux cérémonies, à cause de l'école, il était surpris de le trouver présent. En fait, il faisait tout pour assister à ces occasions. Emad se rappelle, en souriant, qu'il se cachait dans la voiture de son père pour aller aux cérémonies.

Le père dit alors que lorsqu'il s'est assuré de l'amour de son fils pour le mizmar, il a accepté qu'Emad apprenne à jouer au hautbois, parce qu'il a su qu'il allait y exceller. 

Il dit enfin qu'il y a une différence entre le mizmar d’autrefois et celui de ces jours-ci. Aujourd’hui, le mizmar est devenu un art et une science.

Le joueur qui excelle, est celui qui se voit amateur aussi bien que professionnel, conclut-t-il.

(Source : Al-Yom al-Sabie)

 

 

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